Trois jours et une vie / Pierre Lemaitre

Pierre Lemaitre, Trois jours et une vie, Albin Michel, 2016, 278 p.

Antoine, 12 ans, passe beaucoup de temps dans le bois de Saint-Eustache, proche de la commune de Beauval où il vit. Depuis qu’une playstation a fait son apparition dans le salon chez Kevin, les autres s’intéressent de moins en moins à la construction de cabanes et aux jeux dans la forêt. Par la force des choses, Antoine est donc de plus en plus seul, accompagné fréquemment d’Ulysse, le chien des voisins, auquel il est très attaché.

Mais un jour en fin de journée, Ulysse se fait renverser par une voiture. Le père Desmedt, à qui il appartient, n’est pas du genre sentimental : pour épargner une visite chez le vétérinaire, il l’achève d’un coup de carabine.

Le lendemain, anéanti par la tristesse, Antoine se réfugie dans le bois et détruit tout ce qu’il avait patiemment construit. Rémi, le jeune fils Desmedt, arrive et est violemment pris à partie par Antoine qui, dans un accès de colère, se saisit d’un bâton et le frappe.

Pris de panique lorsqu’il réalise qu’il a tué l’enfant, Antoine cache le corps.

Quelques jours plus tard, une terrible tempête s’abat sur la région, interrompant les recherches de la police et de la population pour retrouver Rémi.

Avec ce récit, articulé en trois parties (trois périodes de la vie d’Antoine : 1999-2011-2015) Pierre Lemaitre nous offre un roman noir, parfaitement maîtrisé, qui nous fait réfléchir sur le poids de la culpabilité, la place qu’elle peut prendre dans nos vies, les compromissions auxquelles on se plie : jusqu’où est-on capable d’aller pour sauver sa peau ? Le tout sur fond de petit village où tout le monde se connait et où tout, ou presque, se sait…

 

 

 

 

La brigade du rire / Gérard Mordillat

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La brigade du rire / Gérard Mordillat, Lgf, 2016 (Le livre de poche ; 34269)

Lorsqu’il referme la porte de son logement, Kol ne sait pas s’il reviendra un jour là où il s’est réfugié, à l’écart de tout, après la fermeture de l’imprimerie dans laquelle il était employé, et son divorce. Pour l’heure, il va rejoindre ses vieux amis, Dylan, professeur d’anglais et l’Enfant-Loup, garagiste, avec qui il jouait autrefois au handball. C’est Dylan qui a lancé l’idée : réunir pour un soir tous les anciens, pour fêter les 30 ans de leur victoire lors d’un tournoi interscolaire. Les rejoignent Dorith et Muriel, jumelles et compagnes de Dylan, Zac (Isaac), distributeur de films, Rousseau, professeur d’économie, Hurel, industriel qui rêve de changer le monde et enfin, Victoria, que personne n’attendait, veuve de leur ami Richard.

Au terme d’une soirée festive, nostalgique et alcoolisée, durant laquelle ils refont le monde, ils décident de kidnapper Pierre Ramut, éditorialiste du journal « Valeurs françaises » qui promeut une économie ultralibérale, de l’enfermer dans un bunker et de le faire travailler selon ses grands préceptes : 48h/semaine pour un salaire inférieur au SMIC, productivité poussée au maximum, horaires par pauses y compris le dimanche, etc.

Alors que Pierre Ramut quitte son hôtel pour assister calmement au festival « Cinéma, Tennis et Golf », ils se muent en « Brigade du rire » et passent à l’action…

Extrait :

« -Ecoutez, je ne sais pas à quoi rime cette connerie et je ne veux pas le savoir. Si c’est une blague des organisateurs du festival, bravo, félicitations, c’est réussi. Maintenant, assez joué comme ça, je vous prierais de me raccompagner à mon hôtel.

-Vous êtes à votre hôtel, dit l’Enfant-Loup. […] Ramut regarda autour de lui.

-Dans la cave?

-Dans votre nouvelle chambre. Tout confort moderne : eau chaude, eau froide, eau mitigée…[…]. Un salarié doit pouvoir travailler n’importe où, n’est-ce pas? Je me souviens d’un long papier de vous sur « la mobilité nécessaire des salariés ». Sur la France paralysée, calcifiée par les pesanteurs syndicales et les enracinements mortifères… «